Liberté, Egalité, Luxe… épisode 3

LIBERTE, EGALITE, LUXE… 

– Episode 3 : Vox populi

Spectacle étonnant il y a quelques semaines : des Internautes vent debout contre les créations d’une artiste japonaise pour un géant du luxe en pleine campagne de communication. Que s’était-il passé ?

Les pois colorés de Yayoi Kusama avaient déplu, ils gâcheraient les objets de luxe qu’ils étaient censés mettre en valeur. Œuvre pourtant d’une artiste reconnue, relevaient-ils d’une forme de sacrilège vis-à-vis d’un logo devenu « iconique » ? Il fut un temps où, Murakami en tête, le luxe opérait une révolution et célébrait les noces de l’art, du design et de l’architecture avec des univers d’exception devenus parfois poussiéreux.
Patrimoine et innovation entamaient une love story jamais démentie à ce jour, parallèlement de plus en plus versée dans l’entertainment. Mais là aussi, c’était avant.
Avant que tous égaux sur les réseaux sociaux, nous prenions la parole pour donner notre avis « sur tout ». Avant qu’au détour d’une loi en discussion à l’Assemblée nationale, un tribun de la République ne dénonce, comme le firent avant lui Rousseau puis Robespierre, ce qui fâche aujourd’hui un monde vertueux et l’empêcherait de tourner : les « ultra » riches avec, en filigrane, leurs luxueuses possessions…
Demandons son aide à Victor Hugo. Lequel, dans Les Misérables, écrit ceci : « Ce ne serait pas une haine intelligente que la haine du luxe. Cette haine impliquerait la haine des arts ». Ce qui renvoie d’une certaine façon (sans vouloir pour autant se risquer à un amalgame entre les deux « affaires ») aux aventures des colonnes de Daniel Buren au Palais Royal. Elles déchaînèrent les médias d’avant réseaux. Outragé, un académicien alla jusqu’à oser cette comparaison, reprochant à l’artiste de « vouloir ajouter une moustache à la Joconde ».
On sait que le fait de pouvoir s’exprimer librement (et même de dire parfois n’importe quoi, dans des limites acceptables selon les normes citoyennes en vigueur) demeure un marqueur essentiel de nos sociétés démocratiques. Reste que devenu fragile comme toute bonne idole qui se respecte, le luxe « démocratisé » est désormais à la merci du moindre bad buzz et retournement d’opinion sur des réseaux sociaux qu’il contribue si volontiers à nourrir.

Marie-Clémence Barbé-Conti, Journaliste – mcbc@presse-conseil.com

2023-04-14T17:19:38+02:00

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