LIBERTE, EGALITE, LUXE…
– Episode 1 : Une « démocratie de rois »
La querelle du luxe serait-elle de retour ? Portée par Voltaire « le libéral » (qui défendit l’idée de « superflu nécessaire ») et par Rousseau « le moraliste » (qui condamna ce qu’il considérait comme un « vice »), cette joute s’étendit au 18ème siècle à l’idée de progrès en général et au domaine des sciences et des arts en particulier. « Politiquement payante », comme l’a rappelé le professeur de philosophie Damien Theillier, Robespierre s’en inspira lors de la Révolution française. Serions-nous de nouveau plongés au cœur de cette mêlée historique, en ces temps de crise(s) systémique(s) où nous questionnons ce qui semblait acquis au début du 21eme siècle ? Le Luxe labourait alors avec délices les champs d’une démocratisation tous terrains. Chacun voulait en être et les principaux acteurs du luxe semblaient jouer le jeu. La consommation de produits de luxe était « fun et cool », à la portée de consommateurs (63% en France dès l’an 2000 selon Risc International) qui ne pouvaient s’offrir parfois qu’un parfum, un foulard ou un tube de rouge à lèvres : les systèmes d’exclusivité réservés à une élite avaient beau être préservés, personne n’y trouvait à redire. Quel que soit le niveau de son compte en banque, on avait le sentiment d’être un VIP et d’appartenir à la tribu d’un luxe décomplexé. La théâtralisation sociale était en marche, l’imaginaire associé au luxe nous « réenchantait », il sacrait notre arrivée dans « une démocratie de rois » selon l’anthropologue Ornella Kyra Pistilli. Mais cela, c’était avant la baisse du pouvoir d’achat des classes moyennes, la surexposition d’un luxe « massifié » devenant paradoxalement « hors sol » côté prix, alors même qu’il se donne à tous via les écrans et réseaux sociaux, et le retour d’un discours qui se radicalise sur la nécessité et les bienfaits d’une sobriété choisie. Marie-Clémence Barbé-Conti, Journaliste – mcbc@presse-conseil.com |