Qu’on se le dise, les consommateurs chinois sont de plus en plus exigeants dans leurs achats de produits de luxe. Et les erreurs de communication ou de SAV se paient désormais au prix fort. Dolce & Gabbana, Canada Goose, Cartier, … en ont fait les frais.
Rappelez-vous, en 2018, Dolce & Gabbana diffuse un spot de pub jugé dégradant pour la femme chinoise. Une élégante chinoise devant un plat de spaghettis à la bolognaise (ou une pizza napolitaine), tente d’utiliser ses baguettes. Evidemment la situation est compliquée pour la jeune Chinoise qui est forcément maladroite. Les réactions négatives ont été immédiates sur les réseaux sociaux. La sanction a été massive : les plateformes d’e-commerce Tmall, JD.com … ont supprimé les produits Dolce & Gabbana de leurs sites. Des célébrités chinoises ont critiqué la griffe italienne… Et, au lieu de reconnaître que l’humour recherché avait pu être blessant, le styliste star de la marque, Stefano Gabbana, aurait avivé le ressentiment par des propos violents à l’égard des réactions et de la Chine.
Dolce & Gabbana aurait perdu plus de 40% de son chiffre d’affaires en Chine. Alors que la maison affirme avoir récupéré une partie des parts de marché perdues, ses boutiques en Chine serait régulièrement en solde de 70 à 80%. Et, renseignement pris, dans les grands magasins parisiens, les Chinois déserteraient toujours le stand Dolce & Gabbana !
Plus récemment, en 2021, le refus de remboursement d’une doudoune Canada Goose dans une boutique de Shanghai à une cliente chinoise suite à la découverte de défauts, a déclenché une colère généralisée sur Internet. Les conditions d’échange étaient soumises à un délai de 14 jours contre 30 jours dans les autres pays. Cette règle a été considérée comme discriminatoire à l’encontre des consommateurs chinois qui ont appelé pour certains au boycott de ses produits.
Voilà ce que le site d’actualité chinois rapportait en septembre 2021 sur Canada Goose « les consommateurs doivent également comprendre que les marques étrangères ne représentent pas nécessairement une haute qualité et que les doudounes étrangères ne sont pas nécessairement plus chaudes que celles fabriquées en Chine. Une consommation plus rationnelle et les achats à la demande pourraient bien faire perdre le marché à la « grande oie menteuse ».
D’autres marques telles que Cartier en 2020 suite au sous-titrage chinois jugé inadapté d’une publicité réalisée pour la Saint Valentin, ont également subi les foudres des réseaux sociaux chinois.
Au-delà de satisfaire les attentes légitimes des clients chinois dans leurs achats de produits de luxe, les marques occidentales seraient également aujourd’hui interpellées dans leurs choix de gouvernance : l’idée selon laquelle les postes clés du business réalisé en Chine par ces marques ne soient pas suffisamment occupés par des Chinois est désormais posée.
Ainsi que le rappellent Luca Solca et Jasmine Zhu, dans un article paru dans Business of Fashion, le désir d’une marque de luxe est fortement lié à l’identité du pays d’origine, en l’occurrence dans les exemples ci-dessus l’Italie, le continent américain, la France… Mais estomper cette identité pour davantage coller à l’esprit chinois ne pourrait-il à terme affaiblir la séduction de la marque elle-même ?
Une équation pleine de défis à résoudre qui ne manquera d’être de plus en plus souvent posée aux marques occidentales de luxe à l’avenir.